Chaque Québécois doit plus de 34 000 $ au provincial seulement

Vaut mieux en rire!

Avant de couper des centaines de millions dans les services, est-ce qu’on peut avoir les services ? - Michel Beaudry

23 mai, 2007

Enfin on pose les vrais questions

Yves Boisvert
La Presse, le 23 mai 2007

En apparence, ce n'est toujours qu'une autre grève des transports en commun à Montréal. L'éternel retour du même conflit.

Mais peut-être est-ce au contraire une grève historique. Dans 20 ans, peut-être pourra-t-on voir que c'était la grève de trop. La grève suicide. Celle où le syndicat des employés d'entretien a poussé juste une petite affaire trop loin. Et où on pourra dater ce qu'on appelle «le début de la fin». Début de la fin du vieux modèle.

Vous souvient-il du temps où la Place des Arts avait ses techniciens, dont certains étaient payés en heures supplémentaires quand ils travaillaient le soir (maudit problème, les shows sont souvent le soir)?

N'a pu.

Un moment donné, à force d'écoeurer le monde, on l'oblige à se poser des questions plates qu'il ne se posait pas.

Comme: est-il vrai qu'en Grande-Bretagne, quand ils ont privatisé certains services dans les transports en commun, ils ont économisé 42% entre 1986 et 1998?

La semaine dernière, ça n'empêchait pas les gens de dormir. Ce n'est pas si intéressant que ça, d'ailleurs.

C'est juste qu'en attendant l'autobus deux heures, le monde a le temps de jaser

Jaser d'affaires pas agréables comme: avec les économies, on a amélioré le service à Londres. Paraît que dans plusieurs pays scandinaves, on a donné en sous-traitance des contrats d'entretien et des routes de transport.

Ben cout' donc.

Là, quelqu'un dans la file dit: c'est l'économiste Marcel Boyer qui écrivait ça l'autre jour, mais c'est le président de l'Institut économique de Montréal! Un «think tank» full de droite!

Un autre plus loin dit qu'il est allé en Suède l'année dernière.

Ah, la Suède, ça se glisse toujours bien dans la conversation. Qui dit social-démocratie dit Suède, pas vrai?

Le type qui est allé en Suède explique qu'à Stockholm, l'entretien des métros et autobus est donné par soumission à différents sous-traitants.

En Suède? Êtes-vous certain?

Parfaitement madame, en Suède.

Où est-ce qu'on s'en va, je vous le demande!

Berri-UQAM, v'là les grilles qui rouvrent...

Sur le site Internet de la société de transport de Stockholm (sl.se), on met les choses au clair.

«La Société de transport (SL) est responsable d'assurer des choix de transports en commun de qualité dans le comté de Stockholm, et de faire en sorte que nos passagers reçoivent le meilleur service possible au meilleur coût possible» (je traduis une traduction anglaise du suédois).

On nous dit que la SL négocie pour cela avec divers fournisseurs dans le monde entier pour ce qui concerne l'achat et l'exploitation de tous les autobus, trains et métros, pour le soutien technique, le système de communication, l'entretien, le nettoyage, la billetterie, le financement, etc.

La concurrence internationale dans une société publique?

Eh oui!

Le site nous précise qu'on ne donne pas nécessairement le contrat au plus bas soumissionnaire, mais généralement à celui qui a le plus d'expérience et de succès passés à faire valoir.

La société de transport de Stockholm emploie 500 personnes. Elle donne de l'ouvrage en sous-traitance à 10 000 personnes.

Le but est bien sûr de donner le meilleur service possible et de rendre les transports publics non seulement efficaces et abordables, mais attrayants pour le plus grand nombre. Attrayant est un mot clé.

«Ceci bénéficie aux gens, aux animaux et à la nature de Stockholm», ajoute le site.

Les gens, les animaux et la nature. J'adore ça. Non pas l'environnement ou l'écologie ou un autre concept sympathique mais un peu abstrait. Non. Les gens, les animaux, la nature.

Alors, en attendant le métro ce matin, ou tantôt, ou en ne l'attendant pas, posez-vous cette question que nous ne nous posons pas: si c'est bon pour Stockholm, une ville à la conscience sociale élevée, si c'est bon pour Copenhague, si c'est bon pour plein de villes dans le monde, pourquoi pas pour nous? Le comté de Stockholm abrite près de deux millions de personnes (750 000 pour la ville proprement dite). Ça se compare à Montréal.

Qui a écrit dans le ciel que l'entretien devait se faire à une seule place par des employés de la société qui foutent le bordel à périodes fixes?

Au moment même où le maire de Montréal nous présente un plan ambitieux pour augmenter l'offre de transports en commun, il est temps de chercher des moyens originaux de l'améliorer, de le rendre plus intéressant, plus efficace, plus souple. Et viables financièrement.

Il est aussi temps de se demander si on en a pour notre argent, vu qu'il faudra beaucoup, beaucoup d'argent. Et que tout le Québec va devoir casquer.

Quelle merveilleuse occasion nous est donnée ces jours-ci, n'est-ce pas?

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