Chaque Québécois doit plus de 34 000 $ au provincial seulement

Vaut mieux en rire!

Avant de couper des centaines de millions dans les services, est-ce qu’on peut avoir les services ? - Michel Beaudry

10 mars, 2009

Santé : complexité ou complication

Le 4 mars dernier, le ministre de la Santé et des Services Sociaux annonçait qu’il convoquait une table de concertation sur l’accès aux médecins de famille. Seize groupes d’intérêt participeront à cette table de concertation. (Voir le communiqué de presse ci-après).

Il est facile d’imaginer qu’il ne sortira pas grand chose d’utile de ces discussions. Chaque groupe veillera à protéger ses acquis et à essayer d’améliorer sa sphère d’influence. À la fin les bureaucrates du ministère émettront quelques directives pour donner l’impression qu’il se fait quelque chose.

Le problème de l’accès aux médecins de famille est en soit un problème extrêmement simple : la demande excède l’offre. Donc, il n’y a qu’une solution possible : augmenter l’offre. Pour ce faire, il suffit d’améliorer la productivité des médecins et augmenter leur nombre. (Voir le texte de Joseph Facal ci-après)

Les gens du milieu connaissent les solutions, mais les multiples contraintes imposées par « le système » les empêchent d’agir. Donc, le rôle du ministère consiste à éliminer ces contraintes.

Mais alors, pourquoi n’y arrive-t-on pas? Simplement parce que dans un monopole d’État la règle de base est « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? ».

Bien sûr que le système de santé est un système complexe. La division du travail et de la connaissance impose l’interdépendance des intervenants. Pour gérer cette complexité il faut des règles générales simples et relativement stables. Le ministère doit définir les objectifs à atteindre, trouver le financement et mesurer les résultats. Les instances régionales et locales doivent déterminer comment ils s’y prendront pour rencontrer les objectifs fixés.

Depuis trente ans, le système de santé a glissé de la complexité à la complication. Si la première est nécessaire, la deuxième est nuisible. Comme dans tous les monopoles gouvernementaux, les structures, les règlements et les directives s’accumulent au fil des ans. Chaque fois que les bureaucrates interviennent ils compliquent toujours un peu plus « le système ». On en arrive invariablement à un système ingérable. La bureaucratie monopolise les ressources disponibles au détriment des services à la population.

Si on veut un jour améliorer le système de santé, le ministère doit créer un environnement centré sur les besoins des patients. Il doit en priorité éliminer les complications nuisibles. Les structures redondantes, les conventions collectives anachroniques, les ordres professionnels corporatistes, conjuguent leurs efforts pour immobiliser « le système ». Seuls les gestionnaires les plus aguerris et les plus casse-cou contournent à leurs risques et périls les nombreux obstacles qui les condamnent à l’inefficacité.

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LE MINISTRE YVES BOLDUC ANNONCE LA MISE EN PLACE D'UNE TABLE DE CONCERTATION SUR L'ACCES AUX MEDECINS DE FAMILLE ET AUX SERVICES DE PREMIERE LIGNE

QUÉBEC, le 4 mars /CNW Telbec/ - Le ministre de la Santé et des Services
sociaux, le docteur Yves Bolduc, convoque une table de concertation sur
l'accès aux médecins de famille et aux services de première ligne. Cette
table, qui se réunira trois fois par année, tiendra sa première réunion à
Lévis le 17 avril prochain.
«Comme en témoignent les études internationales, les services de santé de
première ligne sont la pierre angulaire des systèmes de santé les plus
performants, les plus propices à une bonne santé de la population et les plus
efficients sous l'angle économique. Notre gouvernement fait une priorité de
l'accès à ces services, surtout en médecine de famille», a déclaré le docteur
Bolduc.
Les trois objectifs principaux poursuivis par la tenue de cette table
sont les suivants : porter le nombre de groupes de médecine familiale (GMF) de
180 à 300 d'ici 4 ans, ramener à environ 50 % la proportion d'étudiants en
médecine de famille par rapport à ceux qui choisissent les spécialités et
offrir l'accès à un médecin omnipraticien au plus grand nombre de familles.
C'est aussi dans la foulée de l'énoncé de principes en faveur d'une
politique nationale sur la médecine familiale présenté par la Fédération des
médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) que le ministre Bolduc a initié la
création de la table de concertation.
Outre la FMOQ, d'autres partenaires seront invités à participer à cette
démarche de concertation :
<<
- la Fédération des médecins spécialistes du Québec,
- la Fédération des médecins résidents du Québec,
- la Fédération médicale étudiante du Québec,
- le Collège des médecins du Québec,
- l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec,
- l'Ordre des pharmaciens du Québec,
- l'Association québécoise d'établissements de santé et de services
sociaux,
- des représentants des agences de la santé et des services sociaux,
- des représentants des centres de santé et de services sociaux,
- des représentants des départements régionaux de médecine générale,
- des représentants des directeurs régionaux des affaires médicales,
- les quatre facultés de médecine,
- le comité des affaires médicales de la Conférence des recteurs et des
principaux des universités du Québec,
- le ministère de l'Education, du Loisir et du Sport,
- le Comité provincial des malades.
>>

«Les attentes de la population sont connues : chacun veut avoir accès à
un médecin de famille qui prend en charge l'ensemble de ses problèmes de
santé, et qui en assure le suivi dans une perspective de continuité. Ce défi
ne pourra être relevé sans la contribution de l'ensemble des groupes de
professionnels de la santé. Tous ces partenaires doivent se concerter pour
bâtir l'organisation intégrée de services de première ligne dont le Québec a
besoin, et c'est précisément l'objectif de la table de concertation dont
j'annonce aujourd'hui la création», a conclu le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
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Une baignoire sans bouchon
Joseph Facal

Le Journal de Montréal, 09/03/2009 09h45 - Mise à jour 09/03/2009 18h11

Ma chronique du 2 mars dernier m'a valu un courrier si abondant et si émotif que je dois y revenir.

Plusieurs raisons expliquent pourquoi il est souvent difficile au Québec d'avoir accès à un médecin. L'une est que les jeunes médecins, souvent des femmes, travaillent moins d'heures que la génération précédente, parce qu'ils veulent une vie plus équilibrée. Bravo.

Une autre raison est que, chaque année, plus de médecins quittent le Québec qu'il n'en arrive de l'extérieur. En proportion de leur nombre, l'exode des médecins est deux fois plus élevé au Québec qu'en Ontario.

Fausses raisons

On explique souvent ces départs en disant que le Québec n'offre pas aux médecins des conditions de travail et des revenus suffisants pour les retenir. C'est vrai qu'ils gagnent moins ici qu'ailleurs au Canada.

Mais si l'argent était le noeud du problème, les départs se feraient grosso modo dans les mêmes proportions pour les diplômés des quatre facultés de médecine du Québec. Or, les chiffres montrent que les départs sont astronomiquement plus élevés chez les médecins passés par McGill.

Un médecin peut partir à deux moments: il peut quitter sitôt le doctorat en médecine obtenu, s'il décide de ne pas se spécialiser ou de se spécialiser ailleurs, ou il peut quitter une fois sa spécialisation complétée, lorsqu'il doit décider de son lieu de pratique professionnelle.

Dans le premier cas, les chiffres de la Canadian Medical Education Statistics pour la période 1996-2004 montrent un exode annuel moyen de 47,6 % pour McGill contre 1,0 % à Laval, 1,3 % à Sherbrooke et 2,1 % à Montréal.

L'explication ne peut être que les étudiants de McGill sont des étrangers rentrant chez eux,
puisque la proportion d'étrangers dans les facultés de médecine est faible. Ce sont donc des Québécois qui partent.

Dans le deuxième cas, une fois la spécialisation complétée, l'exode de ceux formés à McGill avoisine les 50 %, alors qu'il oscille entre 5 et 15 % pour les facultés francophones, selon les chiffres du Canadian Post-MD Education Registry (www.caper.ca).

Entre 1995 et 2004, 550 médecins diplômés de McGill ont quitté le Québec, ce qui représente les deux tiers de l'exode total de médecins affligeant le Québec. Si le taux d'exode de McGill était ramené à celui des facultés francophones, cela suffirait pour annuler toutes les pertes subies par le Québec au profit des autres provinces canadiennes et des États-Unis.

Vraies questions

Avec un nombre de places allouées d'à peine 1,5 fois supérieur à celui de McGill, l'Université de Montréal forme 4 fois plus de médecins pratiquant au Québec. Pour dire la même chose autrement, seulement 11,1 % des médecins pratiquant au Québec viennent de McGill. Bref, si la baignoire se remplit si lentement, c'est parce qu'elle n'a pas de bouchon.

Est-il raisonnable d'allouer environ le quart des places dans les facultés québécoises de médecine et la moitié des 4 milliards que coûteront les deux mégashôpitaux à une institution qui exporte ensuite ses diplômés dans des proportions si ahurissantes ?

Au Québec, sommes-nous riches au point de nous permettre de subventionner les soins de santé que ces expatriés donneront aux Ontariens ou aux Américains ?

Deux questions comme ça.

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